Concours de films
très courts en
3 plans et 30 sec.

À propos de Cinéhaïku

L’Association Cinéhaïku a été créée en 2016 par des amis qui voulaient unir leur amour du court métrage et de la poésie, en particulier la poésie haïku. La fondatrice de Cinéhaïku, Clara Molloy, aime l’idée de relier les deux formes, et s’est inspirée du livre La préparation du roman de Roland Barthes, dans laquelle l’auteur vante le haïku comme la meilleure forme d’interprétation du présent.

“Quand j’ai commencé à lire des haïkus, j’ai senti que je pouvais les voir dans mon esprit. Ils n’ont besoin d’aucune image parce qu’ils sont si magnifiquement écrits et se suffisent à eux-mêmes. Pourtant, j’étais curieuse de ce lien entre poésie et image, et j’ai pensé que nous pourrions tenter l’exercice”, explique Clara. “Les haïkus ont leurs propres règles, c’est ce que je trouve le plus intéressant. Les très courts métrages peuvent être réalisés sur n’importe quel thème, en adoptant cette façon si concise et particulière de dire les choses, avec une forme subtile.”

QU’EST-CE QU’UN CINÉHAÏKU?

Un Cinéhaïku est un film poétique en 3 plans, compris entre 20 et 30 secondes. Le nom est dérivé des mots « cinéma » et « haïku », un poème très court d’origine japonaise. Dans un Cinéhaïku, le haïku est imaginé sous une forme audiovisuelle.

Un film très court en3 plans

QU’EST-CE QU’UNHAÏKU ?

“Le haïku est une phrase douce et courte, avec un sursaut de pensée”, Jack Kerouac.

Notes tirées de “La préparation du roman”, Roland Barthes, Editions Seuil:

  • Le haïku est un petit poème court d’origine japonaise sur 3 vers.
    Il est aéré sur une page. On sait qu’on n’aura pas le temps de s’ennuyer. C’est un intervalle dans la page et dans le temps, un “Ma”, un “utsuroï” : moment où la fleur va se faner et où l’âme est suspendue dans le vide entre deux états. Selon Yamata, les haïku sont « l’art de réduire à son essence le plaisir infini d’être ému».Le rythme était traditionnellement court/long/court 5/7/5 mais les haïku modernes sont libres.
    Le haïku doit comporter un “mot saison”, c’est à dire un mot qui donne un indice, même très minimal, sur la saison durant laquelle survient le haïku.

    LE VENT D’HIVER SOUFFLE
    LES YEUX DES CHATS
    CLIGNOTENT
    (BASHO)
  • Un haïku provoque un “satori”, une secousse, un frôlage de la conscience, une paix sensuelle, un saisissement émerveillé. Il clignote : il est là, puis disparait.
    LE PETIT CHAT
    UN MOMENT PLAQUE AU SOL
    LA FEUILLE ENTRAÎNÉE PAR LE VENT
    (ISSA)
  • C’est un instant vécu. C’est vrai. “C’est ça !” Il donne la sensation de vérité. Ça a eu lieu. J’en ai intimement le souvenir. C’est l’euphorie de le sentir. Il provoque l’assentiment, l’adhésion, l’acquiescement. Il est absolument juste. Il induit un effet de réel, par une division du réel.
    PELANT UNE POIRE
    DE TENDRES GOUTTES
    GLISSENT LE LONG DU COUTEAU
    (SHIKI)
  • Les “tangibles”, ce qu’on peut toucher, les objets sensuels, y sont nombreux.
    LES FLEURS DE VERVEINE BLANCHE
    AUSSI EN PLEINE NUIT
    LA VOIE LACTÉE
    (GONSUI)
  • Le haïku est parfois synesthésique, on y sent plusieurs choses en même temps:
    SENTIERS SUR LA MONTAGNE
    CRÉPUSCULE SUR LES CÈDRES ROSES
    CLOCHES LOINTAINES
    (BASHO)
  • Parfois le poète prend un art pour en montrer un autre. Ici l’ouïe pour le tact:
    LE BRUIT D’UN RAT
    GRIFFANT UNE ASSIETTE
    QUE C’EST FROID
    (BUSON)
  • Le lecteur ressent souvent un son coupé:
    ROUTE SUR LA LANDE D’AUTOMNE
    QUELQU’UN VIENT
    DERRIÈRE MOI
    (BUSON)
  • Le haïku suscite l’émoi, à la japonaise. Un émoi dispersé. Au Japon la politesse est chaleureuse, à l’inverse de l’occident, politesse et émotions se confondent. La poésie japonaise est discrète, d’un lyrisme silencieux. Elle évoque les choses indirectement sans que ce soit symbolique. Elle s’arrête au bord de l’effet.
    BRUME ET PLUIE
    FUJI CACHÉ MAIS CEPENDANT JE VAIS
    CONTENT
    (BASHO)
  • Le Fuji est tabou dans les haiku : on ne parle pas du mont Fuji, car c’est trop intense.
    Ce dernier haïku est le seul qui l’évoque en 400 ans de poésie, et il y est donc caché…
  • On trouve des kireji dans les haïku, sorte d’exclamations : Ah, Oh… Le corps est saisi et dit : – “Oh…”
    UN VIEUX MARÉCAGE
    UNE GRENOUILLE Y SAUTE
    OH LE BRUIT DE L’EAU
    (BASHO)
  • Le haïku nous renvoie à l’éternité, à l’hyper-conscience, le plus petit rejoignant le plus grand, par le biais de “l’émotion de la tranquillité” selon les mots de John Cage, qui jugeait que la tranquillité était la plus importante des émotions.
    TOUT LE MONDE DORT
    RIEN ENTRE
    LA LUNE ET MOI
    (SEIFUGO)
  • Il évoque la naturalité. Un disciple demande à un sage : “quand la parole et le silence sont tous les deux impasses, comment peut-on ne pas tomber dans l’erreur ?” Le sage lui répond : “je me rappelle toujours Kiangsmen en mars, le cri de la perdrix, toutes ces fleurs parfumées”.

CE QUELE HAÏKU N’EST PAS

  • Pas de pointe, pas de négativité.
  • Pas de lyrisme, pas de sentiment amoureux trop marqué. Pas de carpe diem. L’amour est l’inverse du haïku, l’amour oblige à parler de soi. Le haïku dit “je” mais pour se laisser oublier. Le “je” passe dans le corps.
    FRAÎCHEUR
    AU MUR LA PLANTE DE MES PIEDS NUS
    SIESTE
    (BASHO)
  • Pas de vraie narration. Le bon haïku ne devrait pas pouvoir être continué. Il n’y a rien à ajouter.
    TOUT EN LARMES
    ASSIS IL RACONTE
    SA MAMAN L’ÉCOUTE
    (HASUO)
  • Pas d’idéologie, pas de sens, pas d’érotisme, pas de symbolisme, pas de lourdeur :
    COMME IL EST ADMIRABLE
    CELUI QUI NE PENSE PAS LA VIE EST ÉPHÉMÈRE
    EN VOYANT UN ÉCLAIR
    (BASHO)

 

 

EN RESUME : UN ECLAIR C’EST UN ECLAIR, ABSOLUMENT !